Moir - Nouvelle Lune 2014

- Moir - ou ce qui me reste de : l'amour

Retranscription du texte "Nouvelle lune" lu le 29 mai 2014 à la Galerie Nivet Carzon accompagnée par Adrien Kanter aux machines analogiques pendant la performance L come L'amore avec David Liver. Ma voix devait sortir d'une enceinte que tenait David Liver dans son poing, mais l'enceinte n'a pas marché.
L'enceinte n'a pas marché, est-ce ce qui reste de l'amour ?
> Réecoutez la performance sonore montée par François Ramstein en cliquant ici.
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Nouvelle lune
Fait monter ton cercle
Ascension du désir
Jusqu'à l'évanouissement
Dans le septième ciel


Quatre jours à psalmodier En boucle des onomatopées Sur une seule note enivrante Une note unique et crue Etre seule avec le désir de toi Enclenché dans mon ventre Comme un détonateur déroutant Et presque insupportable Chaud bouillon bouillant Le sourire de ton sexe tordu Le sexe ouvert dans la nuit Un sourire arraché à même les dents Les dents noires qui mastiquent D'une mâchoire puissante Mon trouble dévorant L’implacable vérité Nue et suintante Le désir réveillé par le son Une bouche ouverte sans cri Un truc qui reste en suspens Un trou prêt à lêcher Des lames de poignard Pour retrouver le sourire Au bout de la langue La petite goutte de sang Métallique et amère Se rafraîchir les idées La mémoire Avancer à pas de loup feutrés Sur une neige immaculée Il neige de la douceur J'étais calme Toucher la racine de soi Caresser la peau du tambour Avec les doigts Peau à peau martelant Tambour battant Ton pouls sous mes doigts Sous la douceur du poignet Parchemin des veines Ton coeur petit oiseau vivant Petite chose fragile Comme un poing d’enfant Comme un cartilage Un coeur en cristal Et le corps de l’oiseau Retenu dans le poing Mais quand ? Mais quand ? Mais quand ? Mais quand est-ce arrivé ? Dans mes rêves je me chuchotais A l’oreille de mes rêves Je me susurrais mon secret J’ai un secret je me disais J’ai un secret L’amour peut-il Se retirer d’un coup Comme à marée basse ? Ecouter le son dans la brêche Bien se pencher Capter les creux Est-ce une vocation Le temps du bilan La restructuration Marcher sur un fil Funambule de l’amour Retresser le fil abimé Avec ses doigts de pieds La pupille qui s’agite Dans l’orbite Dans les chemins touffus Les hors-pistes Marcher Marcher Marcher dans la neige Les pas s’effacent Je marche Je marche Je marche en laissant L’empreinte de mon pied dans la neige Je marche en laissant S'étaler au sol Mon grand secret Je marche en attendant La détonation lente De l’idée qui germera Dans ma tête Je marche Je marche Je marche Je marche et mes bottes Frappent et frottent La plainte au sol Je marche Pour évanouir L’orbite de ma peine Je marche Où puis-je Me recueillir ? Me reposer ? Me mentir ? Je marche Je marche Retour dans le passé A la brèche Avant la fissure identitaire Plongée dans l’obscur Réexploration en vue D’une improbable réconciliation Avec moi-même Le temps est-il horizontal ? Vertical ? Ou bien en forme de spirale ? Ressouffler dans l’être Avant la cassure Je marche Je marche Marcher sur du verre En cristal Relation de glace Les pas ne s’effacent pas Les pas ne s’effacent pas Les traits tirés La peau du visage Arrachée Se sentir piégé dans une relation Palais des glaces sans tain Miroirs déformants Deux égos vociférants Palabres sans fin Masques qui se superposent Un à un Les ôter Un à un Les déposer Jusqu’à trouver La profondeur de l’être La nausée Au fond le dégoût La culpabilité Le mal-être Mariage en suspens Désir d’enfants gelés Projets prisonniers Chercher les objectifs Décocher les flêches Tirer dans les arbres Se réinventer une route A la volée Redéfinir ses priorités Jusqu’à ce qu’au moins L’entente revienne L'entente S’entendre S’entre tendre S’entre désir Au lieu de s’entre tuer Aller faire un tour Marcher autour Aller voir ailleurs Avaler une bouche de fille Mon sexe est comme une fleur Défaites ma vie Et arrachez moi le coeur Bris de convictions et éclats Croyances qui volent au vent Tout à refaire Tout à repenser Je me dis que j'ai bien fait De me remettre du rouge Aux lèvres Comme si c’était La chose la plus importante du monde A cet instant c'est d’ailleurs La seule pensée qui monte Depuis mon mental Anesthesié Je me dis que j'ai bien fait De me maquiller avant De m'en prendre une En pleine gueule Mieux vaut être prête A accueillir la fatalité Beauté refaite La mort Qui arrive en plein éclat Dans le feu de l'action Dernière impression De splendeur Avant massacre Des idéaux Parfaits Ultime pensée Il y a peut-être d'autres manières De s'envoyer en l'air ? Au son des oiseaux Prendre son pied le cul mouillé Dans l'herbe fraiche Voir les nuages passer Et le désir débordant avec Je me rends bien compte Que j'ai une vague Crise mystique Rêve de laisser couler A travers le corps La sève de la vie D'appartenir aux divinités De courir nue dans les champs D'en être le jouet Tant pis pour La contradiction Tant pis je suis Prête à laisser-faire Que veulent-ils au dessus ? Qu'ont-ils prévu ? Je me résigne à arrêter De décider De planifier Arrêter de tout penser en avance De voir la vie comme un jeu d'échecs Laisser-faire le flux Et puis on verra ... ... ... Accrocher Accrocher son désir Désir qui roule Tambour battant Tempête au vent Accrocher les branches Suspendre l'écorchée Lui débrancher le corps Qui crie sous l’écorce A grands coups d'écharde La décharner Dépecer les pièces Du coeur Hardcoeur le coeur Hardcore Hardcoeur le coeur Hardcore Le corps Sentir les beats qui montent La sève Coupe coupe La coupe est pleine Coupe coupe coupe La coupe déborde Coupe coupe Coupe le son Coupe les branches Coupe Tout est de ma faute J'invente des histoires Comme des citadelles Des remparts Pour me protéger de moi-même Me construire des châteaux Ravaler le trop dit Le trop plein La vertu Laisser tout couler Qui a vu aura vécu La foudre déchire le ciel M'éclaire la toison Etrangler un sanglot blanc D'une infinie douceur Volonté à consoler Mon obstination chronique Et moribonde Fourmille Furieuse lenteur Comme une grenade au creux du sexe La révolte ravalée Un soupir aspiré Clarté limpide Cristal Retiré Le trop plein le trop dit Le trop loin Le chemin Laisser tout couler Les pensées deferlant Comme des vagues Couper tout A babord dans le mental A tribord dans le cerveau Eponger l'eau avec de la peau Vide Le rien au bord du gouffre Le souffle Ravin Précipice Gorge Plonger Plonger Plonger Est-ce que tu m'attendras les bras ouverts ? Est-ce que tes bras coton me recueilleront ? Quand je vais tomber Comme un flocon de neige Neige dans ma tête Tempête sous mon crâne Et l'oiseau qui se moque Le présage se délite Et je me réveille vieille Dans ma toison touffe argentée Je crois que j'ai rêvé de toi Ca bouge Ca bouge Tourne le manège Tourne Le manège de la vie Tourne Tourne Le manège De la roue Attraper la clé Qui me parle quand Dans mes songes on me parle Est-ce que je me parle à moi-même ? Est-ce que je dors éveillée ? Je ne sais plus Qu’est-ce que ça signifie ? Se méfier de l'ensorceleur Qu’il me dit Mais oui mais je suis prête Je suis prêtresse Soyez tendre ensorceleur Ses vers dans mon oreille J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage J’enrage 22 fois massacré le souvenir d’Eros 22 fois réduit en pièces 22 fois déchiré le tissu 22 bandeaux noirs 22 morceaux de tissus ayant touché sa peau 22 fois sans les yeux 22 fois le toucher versus l’ouïe 22 fois le corps versus l’esprit 22 fois prête à offrir 22 fois cendres 22 fois phénix 22 fois Cassandre 22 fois 22 22 fois fissurée 22 Tout s’accélère Les après-midi dans l’atelier de peinture Les fils acidulés qu’on suçotait En écoutant Madonna Ses grands yeux tristes Ceux que j’ai perdu de vue mais Pas de coeur Ceux qui ont un môme sur Chaque hanche Je lève les cornées au ciel Et dans le ciel Je distingue à peine Mes peines De la pleine lune Je me mets à courir Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Pleine lune Ca me percute mais je continue à courir Histoire d'amour qui vole en éclat Comment je ne l'ai pas vu venir Et mes ex qui rappliquent Comme des bêtes sauvages Comme s'ils sentaient la brêche sous moi Pourtant pas de nouvelles Pendant des années E-tions-nous toujours connectés d'une quelconque manière ? Pourquoi maintenant ? Comment l'ont ils su ? Le savent-ils ? Le sentent-ils ? Qui leur a dit ? Est-ce écrit quelque part ? Dans le grand livre de la destinée ? Est-ce vraiment arrivé ? Ne pouvons-nous pas recoudre le coeur Le réparer ? Nous réveiller demain et avoir oublié nous séduire à nouveau est-il mort le coeur ? M'aimes-tu encore dedans ? L'amour s'est-il retiré ? Moi tout mon corps transpire Le désir chaque pore de ma peau Réclame des caresses Et ca va être dur De me libérer De ton empreinte Ton emprise Toi qui m’as soigné L’origine du monde De mon monde De mon sexe à moi Tout s’arrange Faut juste retrouver La voie de guérison Même à Denfert Les oiseaux chantent Le soleil luit fort Les arbres fleurissent Tout se déroule Papier à musique Après avoir couru assez loin Jusqu’à remonter le temps Et transpirer sous les aisselles On peut décider de stopper Le cours de l'histoire Pour s’asseoir Sur un banc dans le square Repousser à ce soir A demain L’urgence de ce qui Devait être déjà fait hier Et qui en réalité Ne sera jamais terminé Que c’est fou de caresser Son véritable désir D’un revers de la main Le soleil sur le derme L’éblouissement léger Les sons Les sons Les sons de la nature Dans la ville Une faune qui élit Domicile dans le square Les oiseaux sont-ils Plus heureux ici Plutôt qu’en pleine forêt Ou en bord de mer ? Une famille d’étourneaux A construit un nid Dans le socle mal fermé d’une statue L’homme a construit des ports A l’embouchure des mers Avons-nous construit nos histoires d’amour Dans le socle mal fermé D’une histoire de mère Maman ! Tous les soirs je l'aime en m'endormant Au matin je l'oublie La journée il me séduit à nouveau Par ses regards, son odeur, Le timbre de sa voix, Le soir je l'aime en m'endormant Au matin je l'oublie Dormi le front collé Contre l'arcane de la tempérance La temps-errance A formuler des demandes paradoxales Aide-moi à oublier que je l'ai aimé Laisse-moi y penser Une dernière fois avant de m'endormir Mais demain Aide-moi à l'oublier Juste un dernier songe dans ses bras ...   Le chant des oiseaux de nuit Derniers taxis Derniers volets métalliques Des bars qui ferment Premier métro Les filles saoûles Qui puent la clope Qui se remaquillent Qui se font remarquer Choper cet instant magique En partant écouter le son des Oiseaux au réveil dans la forêt Il fait nuit Oiseaux de feu Qui pourfendent le ciel Oiseaux de plumes Qui s'en donnent à coeur joie Le pivert Les mésanges Un corbeau au loin Le soleil fait monter Son cercle de feu A travers les arbres Il fait jour Mettre un pied Juste un pied Dans un miroir magique Un souterrain d’Alice Sentir le sol se dérober sous soi Avoir une vision claire D’une réalité alternative Rester en équilibre Au-dessus du gouffre Contempler Voir toute l’histoire se dérouler Se faire presque peur La rembobiner Revenir en arrière Course folle Trajectoire de désir Prendre des raccourcis Qui rallongent Tourner en rond Autour des places carrées Revenir au même point Avoir une opinion S’en lasser S’en méfier Sauter de joie   Traversée du désir Enflammée par le souffle Le vent sur la terre Le feu sur la glace Mise en branle de la Tectonique des glaces antarctiques Progression vertigineuse Vibrant obstacle Inaccessible sommet Tentation de l’élan vers un Ultime passage Un corps à corps avec D’invisibles esprits du feu Passeurs d’un contre-monde Proximité promiscuité Au plus proche du son A l’intérieur du son Le petit Le doux L’aérien Se réchauffer les mains Faire craquer des allumettes   Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune Nouvelle lune   L’outre-nuit Outrement silencieuse Outrement ravageuse Outrange nuit Délicieuse Ton rire fissurant l’azur assombri Tes talons fracassant le sol Ta silhouette sombre Ondulant dans la ruelle Outrage Ombrage D’outre-monde Cesse Donc Ton Souffle Dessus l’âtre Invariablement Entretenu   Perforée Dans le tropique du cancer Pleurée de la racine arnachée   Acharnée de l’écharde dans le coeur De la lumière intermittente Du grand mâle Faire le constat du pire L’évidence nue La providence Toutes ces histoires qui Entrent en résonance Des petites bulles qui N’éclatent pas La frontière qui Se renforce avec les années Devient une carapace Des petits ballons en plastique mou D’amour en plastique mou Qui éclatent même pas au karcher Même pas au grand coup de pied Ca fait pas rire le pire Des mois et des mois et des mois Et des mois pour oublier le sombre Les tâches sur ma peau Combien de bouteilles d’alcool Des mois et des mois et des années et des Années et le désir qui ne s’éteint pas Pas d’accord Fuir Fuir à toute vitesse A toute volée Démarrer une course folle Aller jusqu’aux limites de la vitesse Des battements de son propre coeur Courir jusqu’à en avoir la gorge arrachée Choisir de renoncer Ne pas regarder derrière Franchir les lignes une par une Le mur du son Ne surtout pas se retourner Ne surtout pas y retourner Au cosmos Aux étoiles A s’étaler Les mille petites gouttes de foutre Dans le ciel azuré Non Non Oui mais non Arrête de rire Je te vois Les lettres De ton prénom Sont déjà Effacées   Je ne me souviens pas t’avoir jamais connu Je ne me souviens pas t’avoir jamais connu Je ne me souviens pas t’avoir jamais connu Je ne me souviens pas t’avoir jamais connu Je ne me souviens pas t’avoir jamais connu Je ne me souviens pas de ton prénom Je ne me souviens pas de mon prénom Je ne me souviens pas  

A force de s’acharner
Les ongles tombent
Les mains tombent
Les bras tombent
Les coudes tombent
Les épaules tombent
La tête roule
Dans la tombe
Les yeux tombent
Les nerfs lâchent
Les pupilles tombent
Les pensées tombent
Les idées tombent
La mâchoire tombe
Les dents tombent
Mon désir de toi tombe
La nuit tombe
L’éternité tombe
Les soupirs tombent
La vacuité tombe
L’espace tombe
Dans ma tombe
Dans la terre


Aurore Laloy, 29 mai 2014


Ca se prénomme - Moir -

Ca gît en moi, dedans ma mémoire,
comme un reflet moiré, un trésoire.
Aurore Laloy

Photo © Aurore Laloy / Service des Urgences Poétiques 2014